Ren reviewed Jeux vidéo, nouvel opium du peuple ? by Olivier Servais
Étude des horizons et des tendances de sociablilité dans le capitalisme numérique
3 stars
Le titre de l'ouvrage est trompeur et manque l'essence du contenu. Si l'on avait souhaité lire sur les mécanismes de contrôle social par le truchement du jeu vidéo, on se trouve plutôt face à une analyse des nouvelles sociabilités poussées par l'avènement du monde vidéo-ludique. En creux se donne la réponse à la question : "Quelle société génère ce type de pratiques sociales ?" On retire d'abord des caractéristiques essentielles : un gamer à vision positive de son avenir personnel sur un arrière fond social pessimiste. Dualité récurrente entre le (techno-) cocon et le chaos du dehors ("jungle out there"). p.21 : oscillation entre cynisme et désillusion, dans une crise de la projectivité p.26 : ambiguité des vues sur la science, à la fois mécanisme de chaos et de salut p.27 : modification anthropologique du relationnel faute de futur : hypertrophie des sociabilités "proches", survie sociale par un noyau de …
Le titre de l'ouvrage est trompeur et manque l'essence du contenu. Si l'on avait souhaité lire sur les mécanismes de contrôle social par le truchement du jeu vidéo, on se trouve plutôt face à une analyse des nouvelles sociabilités poussées par l'avènement du monde vidéo-ludique. En creux se donne la réponse à la question : "Quelle société génère ce type de pratiques sociales ?" On retire d'abord des caractéristiques essentielles : un gamer à vision positive de son avenir personnel sur un arrière fond social pessimiste. Dualité récurrente entre le (techno-) cocon et le chaos du dehors ("jungle out there"). p.21 : oscillation entre cynisme et désillusion, dans une crise de la projectivité p.26 : ambiguité des vues sur la science, à la fois mécanisme de chaos et de salut p.27 : modification anthropologique du relationnel faute de futur : hypertrophie des sociabilités "proches", survie sociale par un noyau de petite taille (type guilde) Effet de bord : fragmentation sociétal, pas de fédération des noyaux et génération "désinstitutionnalisée" (vacuité des symboles historique du vivre ensemble) Conséquence : disparition de la sphère publique, phagocytée par le cocon privé p.40 : massification du jeu en ligne à partir de 2010 p.50 : le plus souvent, le lieu du jeu est le lieu de la famille p.60 : idée fixe de l'auteur sur les eschatologies (discours sur la fin des temps, à compléter par les cosmogonies pour le début) : le religieux y laisse la place à un technoscientifisme (horizon et salut par le cyborg, corps-avatar, transhumanisme) p.77 : envolée sur une "métacréature d'intelligence artificielle collective", kamoulox étrange qui interroge : l'auteur fait-il partie lui même de la population qu'il étudie ? suite avec mythe du téléversement de conscience, sous un jour plus technocrédule que technocritique. p.90 : vivre l'idéal par procuration, compensation des frustrations IRL p.97 : étrange digression sur la dualité urbain/rural, concept intéressant d'"affairement" (T. Périlleux) : noyer dans l'action les interrogations sur les finalités de l'existence. p.100 : globalisation, "liquéfaction des territoires", déstructuration par le "flou des flux" (Singleton) p.108 : la revanche des Ikkikomori : investissement du champs d'action politique (ex. SSLA Second Life Liberation Army, activisme pour plus de démocratie dans le jeu SL) p.113 : par la création "Chômeur Blaster" second degré politique, réalisé en 2014 en Belgique. Exemple intéressant mais qui ne constitue en rien une preuve sociologique d'une tendance politique du gaming. En conclusion, un livre assez désarticulé, qui sent le pot-pourri des ouvrages précédents de l'auteur avec bonus pour le jeu des copains en synthèse et dépassement du cliché du gamer apolitique.